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Le Plumier
15 août 2009

C.F. Ramuz.

01037754921Céline affirmait —peut-être pour ce qu'il lui redevait dans l'émergence d'un style où l'écrit et le parlé tentent de se confondre— qu'il serait, avec lui, le romancier dont on lirait les œuvres au cours de ce XXIe siècle. Je ne sais si cette prédiction se réalisera, ce qui est certain en revanche, c'est qu'on n'entre pas dans l'univers de Ramuz sans éprouver nostalgie, attrait et découverte d'un monde aux personnages troublants. Par les images qu'il suscite du pays Vaudois, contrée rude, contrastée, et les personnages qu'il peint, âpres, cruels, naïfs aussi, il me rappelle Giono, moins flamboyant sans doute, plus intimiste, plus proche d'une réalité dont on se demande si elle ne désagrège pas encore, toujours, les êtres qui la vivent dans quelque recoin de nos montagnes, de nos vallées, mais aussi au cœur même de nos villes.
Il y a chez Ramuz d'abord une langue, travaillée, fondue dans le creuset de sa passion qui peut déconcerter de prime abord, précurseur d'une oralité qu'il voulait transcender pour la fusionner dans l'écrit, s'interrogeant sur la nécessité, l'emploi d'un terme, d'une expression, tel, par exemple cet "à cause que" qu'on ne rencontre plus guère, correct cependant —mais l'écrivain n'est-il pas aussi et surtout le forgeron des mots, n'en déplaisent aux puristes?— et qu'on retrouve chez les auteurs classiques. Tallemant des Réaux en fait un usage immodéré. Lorsqu'on aborde les premières lignes de ses romans l'écriture paraît simple, voire simpliste, mais trois lignes plus bas on est déjà dans l'histoire, on sent l'odeur de la terre ou le goût du potage du soir, on subodore la misère, le chagrin mais aussi les joies que vont vivre ceux qui s'animent sous la lecture, on pressent le mystique des combats que vont se livrer les personnages de ces multiples aventures qui s'étayent comme ceux d'une bible.
Car c'est également cela qui sous-tend l'œuvre de Ramuz, ce protestant nourrit d'étude biblique, foi qu'il abandonne pour l'agnosticisme, cette relation du divin avec le terrestre, dont quelques ouvrages, comme celui que je lis en ce moment, "Le Règne de l'esprit malin", font état de cette confrontation de la vie terrestre avec l'inexplicable, le mystère.
Les hommes étant pétris dans le malaxage des événements qui se succèdent, incompréhensibles à leur esprit irrationnel, les poussant jusqu'à la mort, jusqu'au crime.
Ramuz peint l'univers du petit peuple, villageois ou campagnard, dont les émotions, les actions, les troubles, l'amour, la haine, la jalousie vont bien au delà de ses montagnes natales, franchissant les limites de leur microcosme pour venir nous parler, nous émouvoir, nous étonner.
Nous ressembler parfois.

Ramuz - Romans - La Pléiade, tome I et II
 

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